dimanche 27 novembre 2016

On existe par le mal qu'on fait aux autres. C'est comme ça.

Aurélien GOUGAUD,  Lithium,
2016, Albin Michel, 189 pp.
TABLEAU PARISIEN

Aurélien Gougaud choisit, pour son premier roman, d'aborder les éternelles thématiques de la solitude, de la routine, sur fond de "Paris du désenchantement".

Le roman relate le temps d'une semaine, le parcours d'Elle et d'Il. Enfants de la génération Y, ou perdue, mal grandis et qui peinent à apprivoiser la casquette d'adulte, malheureux au travail, en amitiés et en amour, ils se rencontrent au détour d'une rue, alors que Paris décuve sa fin de semaine.
Tiraillés entre carriérisme, volonté de se reinventer, besoin d'être aimé, peur de s'engager, solitude et excès en tout genre, Il et Elle, enfants du "on verra" se laissent porter par le courant sans jamais réellement lâcher prise. Leur dénouement de leur histoire sera banal, prévisible.
Le livre se lit facilement. Concis, sec, froid.
Le style n'a rien de transcendant: Le cynisme des premières lignes nous avait presque plu avant de conférer lourdeur au roman, force d'être martelé sans cesse sur 192 pages.
Par ailleurs, les personnages ne sont hélas pas assez fouillés à mon sens, au point où l'on ne sait trop pourquoi ils sont aussi malheureux qu'ils prétendent l'être. Autre ombre au tableau, toutes les figures féminines, sans exception aucune, semblent être accros au désastre, présentées comme les martyrs d'un système carnassier, dans la gueule duquel elles se jettent en chantant.

Déception donc, pour ce premier roman qui n'aura su nous toucher.
La faute à des thématiques pas très originales et mieux traitées ailleurs- nous pensons par exemple à Mes illusions donnent sur la cour de Sacha Sperling-.  
L'intrigue est aussi évanescente que les personnages et leurs existences. 
C'est aussi cela que dit Lithium: la solitude des grandes métropoles.

N.A

jeudi 17 novembre 2016

Plus j'étais conscient du mal que je lui faisais par mes paroles, plus l'envie me prenait d'en rajouter.

Chiyo UNO, Ohan, 2014,
Piquier Poche, 122 pp.
Ohan est un roman voyeur au fil duquel Chiyo Uno nous dévoile l'intériorité troublée d'un personnage au bord du gouffre, déchiré entre la tentation de se remettre en ménage avec son épouse légitime et le confort que lui procure la geïsha aux crochets de laquelle il vit.

L'auteur nous amène progressivement au dénouement tragique dont les signes précourreurs jalonnent le roman, le plaçant de ce fait sous le signe du symbolisme le plus lourd, doublé d'une narration omnisciente qui laisse présager l'escalade des évennements et la catastrophe finale.
Sur fond de triangle amoureux, Kanô, homme infidèle, paresseux et surtout terriblement lâche prend la parole, pour tisser un mea culpa ponctué de jérémiades où il n'hésite pas à prendre le lecteur à temoin de sa faiblesse de caractère et de sa lâcheté.
Confession biaisée dès le départ par celui qui se posera en victime éternelle alors qu'il orchestre à son insu les même mécanismes qui voueront ses proches à leurs pertes par souci de préserver ce qu'il a de plus cher : son moi égocentrique.
Le protagoniste pleurnichard est tout bonnement éxécrable. Ses plaintes incessantes minent d'emblée la pitié que le lecteur serait tenté d'éprouver pour lui.
Ohan est d'abord l'histoire d'un homme primaire, d'une lâcheté terriblement ordinaire, qui, lorsqu'il est sommé de choisir, prend la fuite.  D'un homme qui n'assume pas.

La traduction du roman n'a rien d'extraordinaire et n'arrive pas à rendre l'ambiance somnambulique qui jalonne le roman et qui aurait du refléter le manque de lucidité du protagoniste.
Si la lecture ne nous a pas ému outre mesure, il est certain que nous avons été outrés par la couardise et la molesse de Kanô.
Catharcis réussie? Sans doute. Si Ohan est si insupportable, c'est peut-être parce qu'il nous tend le miroir sans complaisance de nos propres lâchetés.

N.A