dimanche 28 août 2016

Chaque femme en âge d'avoir des enfants doit être mise dans la possibilité d'accomplir son devoir envers la race humaine et le monde vivant...


René BARJAVEL, Ravage, Folio,
2010, 320 pp.
Le traitement de Ravage n'a rien de bien exaltant.
L'histoire est on ne peut plus basique: un monde développé à l'extrême où la nature reprend soudainement ses droits, décimant le faits des hommes à coup d'incendies gigantesques, de famine et de choléra. Le fait que Barjavel ne propose rien d'interessant du point de vue de la narratologie n'arrange rien, au contraire. Les évennements, à cause de la narration linéraire, s'enchainent lentement, beaucoup trop lentement lorsque l'on sait d'avance que la moitié des personnages seront décimés en cours de route. Même les chutes à la fin de chaque chapitre deviennent rapidement lassantes parce que multipliées par l'auteur qui dénature l'effet de surprise qu'elles auraient du suciter. Outre l'incohérence des personnages et l'artificialité des dialogues qui contribue à les rendre encore plus insupportable qu'ils ne l'étaient déjà (le seul moment jouissif du livre est lorsqu'ils s'entretuent dans le cadre d'une hallucination collective), Barjavel verse rapidement dans des clichés grossiers et archaïsants au prossible. Le fait que le livre ait été écrit dans les années quarante ne justifie en aucun cas la mysogynie on ne peut plus primaire de ce roman.

J'ai toujours vu en la science-fiction un genre très masculin où la gente féminine était peu ou mal représentée, où elle avait du mal à se faire une place et ce livre n'a rien fait pour me faire changer d'avis, bien au contraire.
En lisant Barjavel, j'ai appris que pour réussir, une femme devait se livrer à l'art de la "promotion-canapé". J'ai aussi appris qu'elles avaient toujours tendance à faire les mauvais choix, en attendant que l'homme viril vienne les tirer de leur mauvais pas. Enfin, j'ai appris que pour être utile, une femme doit d'abord assumer pleinement son rôle de génitrice, où plutôt devrais-je dire de génisse, dont la seule vocation est de faire proliférer le troupeau.
Certains sauront passer outre. Pour ma part, je préfère simplement passer tout court.

N.A

Ils étaient aussi avares de paroles l'un que l'autre, ce qui rendit leur cour infinie.

Jack LONDON,
Pour cent dollars de plus, ed. Allia,
2014, 96 pp.
Joe et Geneviève, petites gens, filent un amour bien comme il faut,  ou presque.
Car Joe est boxeur, de métier et de passion. Si la jeune femme réprouve cette activité, qu'elle considère avec une jalousie presque maladive, cela ne l'empêche pas d'assister au dernier combat de la carrière de Joe dont la finalité est d'assurer les cent dollars nécessaires à l'installation du jeune couple.
C'est travestie en homme, de peur que la bonne société ne la reconnaisse qu'elle assistera au combat livré par son amant, à travers un trou dans un cloison donnant sur le ring.
La manière dont Jack London dépeint la misère et les moeurs de l'époque est tout à fait admirable par son réalisme on ne peut plus cinglant. La relation des personnages est on ne peut plus conventionnelle, voire tristement pittoresque. Le corps est un ennemi, une tare qu'il faut à tout pris réprimer au risque de passer pour une "fille" ou pour un individu de mauvaise vie. Cette tension, que seul Joe parvient à exorciser par la boxe et dont Geneviève, puribonde à l'excès et victime de son environnement soci-économique, ne saura se défaire, jalonne le roman.
À travers le combat de Joe, l'auteur semble conter l'histoire des classes, d'une classe à laquelle rien n'est aquis et qui doit se battre afin de réaliser ses aspirations, même les plus simples. London, à travers le combat impitoyable que se livrent Joe et Ponta (seul personnage digne d'empathie à notre sens) brosse le tableau d'une lutte, bec et ongles, pour la survie.
Les illusions n'ont pas leur place. L'auteur de Croc-Blanc nous le fait bien comprendre en les envoyant valser dans les cordes du ring.

N.A